Place aux choses sérieuses ! Ce soir à Ljubljana s’est achevée la préparation de l’Equipe de France, une série d’une dizaine de matches d’un niveau assez inégal, où les Bleus nous auront tout à la fois ravis et frustrés, rassurés et inquiétés. Bref, une préparation comme on en voit finalement assez souvent, à ceci près : Vincent Collet et son staff n’ont pas traîné pour décider qui serait du voyage en Slovénie, ce qui est fatalement un signe positif pour le vécu collectif, les automatismes des douze sélectionnés. Enfin, aucun de nos joueurs ne s’est sérieusement blessé lors de ces matchs amicaux, ce qui est évidemment primordial avant d’aborder l’Euro.
Sur le bilan comptable en lui-même, ne lui donnons pas une importance exagérée. La France termine avec 7 victoires pour 3 défaites. Ce qui ne veut pas dire grand-chose. Elle aura relativement facilement assuré face aux équipes les moins prestigieuses, du genre de celles qu’elle devra écarter au premier tour de l’Eurobasket. En revanche, si elle s’en est sortie - de peu - face à la Serbie et la Slovénie (deux équipes qui semblent à même de jouer les outsiders dans les jours qui viennent), elle s’est cassée les dents sur les deux vrais gros morceaux qui lui étaient opposés, Grèce et Espagne. Deux favoris pour le titre.
Face aux Grecs, en début de préparation, les Bleus n’étaient sans doute pas au même point de préparation et de forme que leurs adversaires, et se sont montrés incapables de tenir le coup sur les postes extérieurs, à l’image de nos présumés leaders Parker et Batum. Les Grecs seront forts à l’Euro, pas de doute là-dessus. Lors de ce match, Alexis Ajinça a certes scoré 16 points (à 7/8 !), mais n’a finalement passé que dix minutes sur le terrain, à cause des fautes. Nous y reviendrons…
L’Espagne c’est une autre histoire. L’ennemi intime des Bleus s’est à nouveau montré intraitable, tant à Madrid qu’à Montpellier, alors même que ce sont deux des performances les plus encourageantes pour l’EDF. Lors de la seconde manche, en particulier, les Français avaient la partie en mains, et comme l’a finalement bien résumé Nico Batum, ont plus donné la victoire aux Espagnols que ces derniers ne sont allés le chercher. Ce qui arrive fréquemment lorsqu’un avantage psychologique existe entre deux équipes. Même si l’équilibre de l’escouade espagnole s’est largement déplacé de la peinture sur les extérieurs (quelle ligne arrière Rodriguez – Rubio – Llull – Calderon !), le résultat est le même, depuis de trop longues années… Et même si Marc Gasol semble assez esseulé in the paint, il va falloir le contrôler un minimum.
Reste au final une impression tout de même positive, de ce long mois d’août… Les Bleus, à l’image de ce que l’on avait déjà commencé à voir depuis 2011, sont de plus en plus efficients en attaque, plus adroits globalement, mais hélas aussi moins durs qu’avant en défense. A ce titre le choix d’un back up comme Thomas Heurtel derrière TP n’est pas anodin, et symptomatique aussi sans doute d’un choix délibéré de Vincent Collet, de ne pas aller contre la nature des talents présents. Si la France doit mettre plus de points pour gagner, elle les mettra. Qui s’en plaindra ? Dans le même ordre d’idées, la sous utilisation de Charles Kahudi, notre stoppeur attitré sur les extérieurs, lors des matches amicaux, va aussi dans le sens d’un changement de philosophie, en douceur… Les boulons défensifs ont tout de même été resserrés, lors du dernier match, contre la Slovénie, et il faudra impérativement que ce soit le cas désormais : lors des trois défaites de préparation, les Bleus ont encaissé plus de 80 points de moyenne… A ce train là, personne, sauf peut-être l’Espagne, ne peut s’en sortir.
Concernant les joueurs, leur forme actuelle, leur utilisation par le coach et l’impression dégagée par chacun d’entre eux, quelques changements semblent également poindre, par rapport aux standards habituels. Il est temps de faire une rapide revue d’effectifs.
Nando de Colo #12 : Il est devenu au fil des années le joker offensif de l’EDF. C’est à nouveau dans ce rôle qu’on l’attend en Slovénie. Il est l’un des meilleurs de l’équipe pour se créer des shoots, mettre des points face aux grosses défenses. N’a pas forcément le volume de jeu pour être titulaire, mais avoir un tel talent sur le banc, c’est une bénédiction pour Collet. Un des plus réguliers en prépa.
Johan Petro #7 : On le connait, surtout pour ses travers défensifs que pour ses bonnes mains. Mais il est finalement une bonne pioche, à ce stade. Efficient à mi-distance, pas ridicule aux rebonds, il évite la plupart du temps les sautes de concentration dont il est habituellement coutumier. S’est visiblement bien accommodé de son rôle d’intérieur de complément. 2m12, et 5 fautes à donner sur Gasol and co.
Tony Parker #9 : je ne partage pas l’enthousiasme assez général qui a suivi ses 26 points en une mi-temps contre l’Espagne. Il semble fatigué, après une saison de marathonien hyperactif (finales NBA, tournée en Asie…), et des années sans se reposer l’été… Ne s’est pas blessé, ce qui est essentiel, tant sa présence est la condition sine qua non de nos ambitions en Slovénie. Devra être ménagé sur le premier tour, et il faut souhaiter pour cela que ses back ups fassent bien le boulot. Alors, sur les matches couperet, on reverra peut-être le TP plein de jus, inarrêtable en pénétration, qui régale depuis des années, au Texas ou ailleurs.
Tomas Heurtel #10 : la surprise du chef. Adroit, vif, plein de culot en attaque, avec un belle vision du jeu en prime. Thomas perd peu de balles, et semble vraiment en grande forme. Un cabochard. Ne doute de rien. Hélas, mais on le savait, ses appuis de ballerine en attaque se transforment en semelles de plomb de l’autre côté du terrain, et il faudra faire avec cette faiblesse récurrente dans son jeu, et compenser au mieux sur les aides défensives.
Antoine Diot #6 : le dernier match, gagné aux forceps contre la Slovénie, avec un Diot ultra présent dans le money time, a dû changer pas mal de choses pour lui. Jusqu’ici, il avait presque l’air d’une erreur de casting, tant son apport était faible, et tant Collet semblait devoir le cantonner au bout du bout du banc… Mais contre le pays hôte de la compétition à venir, on a retrouvé Antoine tel qu’il est vraiment : fiable balle en main, clairvoyant (belle entente avec Ajinça), adroit et clutch. Pas manchot en défense, ce ne sera pas du luxe à ce poste.
Michaël Gélabale #15 : le métronome. Connu de tous en Europe, il est à la fois discret et indispensable à cette équipe. Solide en défense, sans réel point faible. Il reste sans doute le meilleur Bleu sur le catch and shoot. On aimerait parfois le voir prendre plus d’initiative, mais à sa décharge, il fait vraiment rarement de mauvais choix.
Joffrey Lauvergne #4 : la surprise du chef, bis ! Parti pour, au mieux, passer le cut de peu et cirer le banc, le fils de son père a montré qu’il a de qui tenir, et sera bien plus qu’un joueur de complément. A énormément progressé au Partizan. Par sa taille, ses qualités athlétiques et son énergie, il est déjà indispensable à l’équilibre défensif de l’EDF. Un rebondeur naturel. Comme dirait Jacques Monclar, Joffrey c'est une usine ! A parfois tendance à s’égarer, et à disparaitre, comme face à l’Espagne à Montpellier. Défaut de jeunesse, sans doute. Il faudra rester focus en Slovénie.
Nicolas Batum #5 : Batman est potentiellement le meilleur ailier du Vieux Continent. Ses performances face à l’Espagne (28 puis 24 d’évaluation) plaident pour lui. Il doit encore gagner en régularité, il le sait, il y travaille. Est devenu très fiable aux lancers, à trois points, et a vraiment progressé dans son jeu de passes. Devra endosser un costume de leader lors des gros matches, et ne pas confondre alors les termes leader et sauveur… Si Batum parvient à exploiter tout son potentiel, on sera bien.
Charles Kahudi #8 : une situation un peu bancale pour l’instant. Depuis toujours, il fait partie des joueurs qui sont à la limite de faire le voyage, ou rester à la maison. Cette fois, il sera là, et si l’on se fie à ses performances d’il y a deux ans, c’est un vrai bonus, tant sa défense et de niveau international. Mais la préparation ne plaide pas vraiment pour lui : très peu utilisé, il n’a pas pesé réellement, et semble encore chercher sa place et son rôle. Polyvalent et appliqué, il pourra se rendre utile, si Collet le fait jouer.
Alexis Ajinça #14 : Un arc en ciel ! Le soleil et la pluie en même temps… Alexis, à voir jouer, est aussi enthousiasmant qu’il est frustrant. Il est devenu un vrai bon joueur, potentiellement une arme atomique en attaque au poste de pivot, mais peine encore à accomplir les exploits pour lesquels on le devine paré. Doit absolument se canaliser et éviter les fautes bêtes, notamment sur les extérieurs. Des mains en or, même s’il a parfois pêché par excès de précipitation lors de la préparation. Un intimidateur hors pair, comme nous n’avons jamais eu en EDF (pardon Fred Weis). Son bon dernier quart contre les Slovènes doit le mettre en confiance.
Florent Piétrus #11 : lui aussi, on le connaît, tout le monde le connaît en Europe. Il est la clé de voûte défensive de notre équipe de France, et assure par son activité de l’ombre des balles volées, des shoots loupés adverses, des rebonds offensifs. Il est indispensable, même s’il n’est sans doute pas souhaitable qu’il joue trop. Son jeu à l’énergie doit bénéficier d’une fraicheur physique optimale, pour réellement être efficace. Une valeur sûre, un totem.
Boris Diaw #13 : Leader spirituel des Bleus avec son pote TP, il m’inquiète au plus haut point. Semblait assez saignant en début de préparation, mais s’est peu à peu enfoncé dans l’insignifiant sur les derniers matches. A se demander si sa condition physique, toujours précaire en apparence, n’est pas une limite infranchissable dès lors que le niveau athlétique des adversaires progresse… Il n’est pas tabou de dire que Boris est sans doute un poil trop gros, pour un gars qui joué les finales NBA et n’a quasiment pas coupé cet été… Ok, le Président tient sur ses appuis face à n’importe quel Babar des raquettes, sa qualité de passe est intacte, mais il a disparu des écrans statistiques aux rebonds, contres, et même points marqués. Il nous doit une revanche en Slovénie.
… Voilà, finalement, comme à chaque fois, bien difficile de savoir si les bonnes surprises vont confirmer, si les déceptions ne vont pas s’estomper, si les inquiétudes sont bien fondées. On en saura plus à partir de la semaine prochaine, et encore pus certainement lors du second tour. Là, on verra vraiment si nos Bleus sont taillés pour l’aventure qui s’offre à eux. Bonne chance à eux, il en faudra. Forcément.
Récapitulatif des scores en préparation :
France - Finlande (02/08/13, à Pau) : 101 – 93
Allemagne – France (06/08/13, à Mannheim) : 84 – 89
France – Allemagne (09/08/13, à Strasbourg) : 74 – 66
France – Croatie (10/08/13, Strasbourg) : 92 – 60
France – Grèce (11/08/13, à Strasbourg) : 67 – 79
France – Serbie (15/08/13, à Antibes) : 78 – 74 (OT)
France – Géorgie (17/08/13, à Antibes) : 86 – 71
Espagne – France (23/08/13, à Madrid) : 85 - 76
France – Espagne (26/08/13, à Montpellier) : 84 - 85
Slovénie – France (31/08/13, à Ljubljana) : 65 - 70